La galerie Nuke présente la première exposition personnelle de l’artiste Simon Ripoll-Hurier, sélectionné par un jury de commissaires d’expositions, critiques et artistes suite à sa participation à l’événement hotelF1 et l’art éphémère. Différentes œuvres produites en 2008 et 2007 sont ici rassemblées autour du titre On The Town. La vidéo éponyme, projetée sur une structure en bois, est constituée d’extraits de comédies musicales américaines, regroupés autour du thème de la ville. Les acteurs de différents films chantent et dansent sur une mélodie qui a été supprimée par l’artiste. Les textes des chansons ne sont compréhensibles que par leurs sous-titres, décrivant la ville et ses rues comme l’endroit de tous les possibles, celui de la promenade, de la rencontre, celui où il faut faire sa place. Les paroles devenues inaudibles, l’artiste a remplacé leur positivisme volontariste par ce qu’il est habituel d’entendre dans la ville : les voitures, les passants, les sirènes. La poésie artificielle et chantée des comédies musicales laisse place à une musique concrète, reprenant le rythme urbain, laissant de côté les fantasmes proposés par les metteurs en scène d’une ville illusoire.
La transposition d’une forme vers une autre, d’un langage vers un autre, met en jeu un processus d’équivalences activé par Simon Ripoll-Hurier dans les différentes oeuvres de l’exposition. Dans Translations #2 – Cityscapes, plusieurs panoramas de quartiers d’affaire dans différentes villes ont été chacun transposé en une suite de notes, jouées et orchestrées par l’artiste. Les mélodies montent et descendent en suivant la hauteur des grattes-ciels, visibles sur une photographie de ces mêmes quartiers. Le panorama photographique laisse place à une mélodie décrivant, elle aussi subjectivement, Manhattan, La City ou encore La Défense. Cette tentative incertaine de décrire l’espace par le son renvoie au constat que la photographie, elle aussi, n’est capable de retranscrire le réel que de manière tout aussi partielle et imparfaite, même si son processus mécanique prolonge l’illusion d’une réalité.
La ville est ici le lieu de collisions sensorielles, de limites spatiales et de flux interminables. Le chaos de «la vie moderne», dont Paris a été le paradigme au XIXe siècle, et l’organisation architecturale de nos expériences urbaines se retrouvent superposés dans le travail de Simon Ripoll-Hurier. La spécificité de l’exposition est de lier les aspects aliénants de la ville avec le mouvement qu’elle génère et les fantasmes qu’elle suscite. La ville, découpée et romancée par le cinéma, se retrouve liée par moments à des éléments de son réel à travers la bande son de la vidéo On the Town, pour s’en éloigner aussitôt dans les propositions de génériques musicaux pour panoramas de quartiers d’affaires de Translations #2 – Cityscapes. La ville est confrontée à ses limites sonores et visuelles dans la pièce Périphériques, pensée comme un poème musical. Dans une autre œuvre, l’artiste suggère des images qu’il associe à certains sons urbains. Ceux-ci sont classifiés à la manière de la musique des films muets, qui, organisée par type de scène, se retrouvait invariablement d’un film à l’autre suivant une typologie pré-établie. Ces retranscriptions d’expériences perceptives suggèrent que nos perceptions sont illusoires, manipulées par les intentions que nous projetons sur l’espace. Ainsi nous sommes confrontés à notre expérience quotidienne de l’illusion, qui se produit lorsque nous créons par nous même un fil conducteur personnel entre les éléments concrets de la ville, construisant à partir de notre expérience de la rue des scènes fantasmées.Simon Ripoll-Hurier est né en 1985. Diplômé des Beaux-Arts de Paris en 2008, il vit et travaille entre Rouen et Paris.