Les références et les inspirations artistiques de Kris Van Assche se nourrissent de la poésie du quotidien : une certaine manière de regarder ce monde, une volonté constante, modeste mais farouche, de le rendre plus beau, fût-ce par de minuscules modifications. Une poésie que l’artiste partage avec d’innombrables poètes, qui comme lui, ne s’affirment pas forcément comme tels, mais qui s’attachent, au quotidien, à décorer le monde. Si ces poètes- là décidaient de faire la grève, le monde en serait mis à mal, car quand bien même ces poètes ne sont ni les plus productifs ni les plus performants, ce sont eux qui nous protègent de la vulgarité et de la cruauté.
Kris Van Assche les imagine, ces poètes, en pleine manifestation. La manif, en France, c’est aussi le quotidien. Un quotidien qui rassemble autour d’une cause commune des individus très différents. Certains sont là pour la grève avant tout, d’autres en tant que poètes d’abord ; certains hurlent, alors que d’autres sont presque silencieux ; certains sont grands, d’autres petits ; certains engagés, d’autres se tiennent à distance ; et d’autres enfin restent, quoi qu’il en soit, poètes... : une voie, un choix, silence ! Les haut-parleurs sont hors service.
Selon Paul Ardenne, « Le travail plastique de Kris Van Assche ne se refuse pas à l’expression directe, à la littéralité : il s’agit avant tout d’être clair, lisible, efficace. Pas ici de double discours, de jeu avec le second ou le énième degré. La forme se veut fond, le style se veut langage, l’art se veut communication. Intituler une installation « Poète en grève », au-delà de l’allusion à ce qui serait une nécessaire suspension du verbe, ou sa révolte, c’est dire simplement : j’ai du mal à communiquer, à trouver pour mes mots un domaine d’expansion ou d’accueil, alors silence. « Ce qu’on ne peut pas dire, il faut le taire », écrivait Ludwig Wittgenstein. »